L'affaire Kitty Genovese

L'affaire Kitty Genovese.

Plus qu'une histoire sur l'indifférence, c'est un exemple qu'on utilise très souvent en psychologie sociale pour rappeler à quel point l'être humain tend à rejeter sa responsabilité personnelle sur la société et la collectivité. Quitte à oublier que, au sein de sa vie quotidienne, il est dominé par une individualité écrasante qui régit ses rapports sociaux. Kitty Genovese est cette New-Yorkaise poignardée à mort près de chez elle, à Kew Gardens, dans le Queens. C'était le 13 mars 1964. Le lendemain, le New York Times a consacré la principale tribune de sa une à l'annonce suivante: "Trente-sept personnes assistent à un meurtre sans appeler la police."

L'enseignement de cette histoire, en quelques mots ? Le voici: un unique témoin qui assiste à un événement tragique et qui prend conscience d'être seul a plus de chances d'intervenir qu'un individu conscient d'être entouré par d'autres personnes, par la présence collective de ses semblables.

Sans entrer dans le détail de cette histoire et des polémiques qu'elle a fait naître (...) le message est clair: le pluralisme semble souvent créer une modification, une transformation, même momentanée, de l'individualité, qui devient plus légère. Le résultat final, lui, ne change pas: une pauvre fille est massacrée en pleine rue par un fou tandis que tous les habitants regardent (probablement) la scène derrière leurs rideaux. Personne ne met le nez dehors. Au cours de la première demi-heure, personne n'appelle la police, malgré les cris de la victime. Les lumières allumées, toutes ces silhouettes en ombres chinoises s'observent entre elles, derrière leurs carreaux. En diffusant la responsabilité (toi aussi tu regardes, il n'y a pas que moi, pourquoi est-ce que ce serait à moi d'agir et pas à toi?), elles diminuent forcément l'impact personnel qui motive la volonté première d'intervenir.